A chaque fois que je me réfère à l’histoire de l’Algérie, à des temps immémoriaux, j’éprouve un sentiment de plénitude comme si les rides de ma nation me consolaient de la fatuité de quelques quidams représentant l’emblème, en cette ère des suspicions. Dans ce numéro de L’ivrEscQ, il est question de Constantine. Oui Constantine ! Ville millénaire amazighe, convoitée par certains, quasi interdite pour ses fastes à d’autres, néanmoins, demeure d’une beauté époustouflante. Elle est sur un rocher, comme l’écrit si bien Malek Haddad. En la contemplant, on a peur qu’elle perde son équilibre par l’histoire des hommes qu’elle a connue ; en dehors des débats surenchéris pour cette manifestation 2015-2016, je remonte l’horloge en me situant dans l’air du temps. C’est si fascinant de se rappeler, par lubie des époques, et dépassant des couacs du présent, que la cité Cirta, édifiée 3000 ans avant J.-C., est la capitale du roi Massinissa. Ancienne Cirta ou Kirtha, est détruite par Maxence lors d’une insurrection, puis relevée par Constantin en 311, empereur auquel elle doit son nom. Vandales, Byzantins, Ottomans, ainsi Constantine est choisie au XVIe siècle pour être la capitale du Beylik de l’Est. Elle est la dernière ville d’Algérie à résister aux Français. Elle chute en 1837. La dernière fois, que je m’y suis rendue, cinq à six ans en arrière, pour ma conférence à l’Institut Français, je suspectais une ville fantôme, presque inhabitée, triste, moribonde malgré la beauté des lieux. Seulement, les écrits et le savoir, précisément la littérature, grande consolatrice ressortent l’indéchiffrable de la ville d’Ibn Badis. On ne peut pas évoquer Cirta sans évoquer les siens, notamment ce fondateur de l’Association des oulémas musulmans algériens. Aux idées réformistes aussi bien dans le domaine religieux que politique, il revendiquait les origines berbères remontant aux Zirides, et signait ses articles de presse Abdul Hamid Ibnou Badis Essanhadji, la confédération berbère Sanhadja. Ainsi, la date de son décès, 16 avril, est décrétée journée du Savoir pour appuyer encore et encore la place de l’intellectuel algérien. Le 16 avril 2015, Constantine est hôte des peuples arabes. Constantine restera la ville de moult écrivains et penseurs algériens. Qui ne se souviendrait pas de Ahlem Mosteghanemi par Mémoires de la chair, un émerveillement qu’on éprouve à la lecture de cette prose poétique ou encore Nadjia Abeer, Malek Bennabi, immense penseur, l’auteur de Nedjma, Kateb Yacine et tant autres auras émanant de ces êtres exceptionnels inscrits à jamais dans le legs algérien ; sans oublier que Constantine est pionnière en Algérie à organiser en avril 1972, dix ans après l’indépendance, la première rencontre poétique des auteurs de langue arabe et d’expression française. Bonne lecture !
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